Les travaux et les jours
(après Hésiode)
à C.
les étoiles
sept soeurs
en quarantaine
dans la campagne
la neige tombe
comme une rengaine
quarante jours sans soeurs
quarante nuits noires
et la cloche une fois l’heure
sonne la fin de l’histoire
au quarante et un reviennent
les sept lendemains
sept soeurs se lèvent
fais ta moisson
et quand les soeurs se couchent
sème ton grain
l’économie
donne à celui qui donne
rien à qui donne rien
qui donne à qui lui donne pour cent écus
deux cent écus
sans un refus
donne à celui qui donne
rien à qui donne rien
qui donne à qui lui donne pour cent écus
deux cent refus
a dans le cul
.
laisse ton voisin où il est
mais s’il passe au pied de ta maison
viens donc manger bon voisin
prends une queue de ce radis
tu me la rendras au paradis
.
ajoute ce qui vient à ce que tu as
et tu éviteras
la faim qui fait mal
le froid qui fait mal
misère qui fait mal
à toute petite chose
ajoute une petite chose
et fais ça souvent
et encore ça souvent
si bien qu’à la fin
frigo est plein
.
à l’hivernage
le bon fermier
a grenier plein et bon manger
le bon à rien
fait soupe à rien
de son chômage
la mesure
fais un mortier de trois pieds
un pilon de trois coudées
un essieu de sept pieds
c’est la bonne mesure
s’il a huit pieds il te reste de quoi faire un maillet
.
taille une roue de trois empans
pour un chariot de dix palmes
cherche dans la montagne si tu trouves un beau bois
solide et courbe pour le joug des boeufs
.
avoir deux charrues maison
c’est bien mieux
une d’un seul bout l’autre en deux
tu en casses une
l’autre est aux boeufs
.
achète deux boeufs de neuf ans
c’est la force sans défaut
le meilleur de l’âge
deux boeufs forts à l’ouvrage
se battront pas dans le sillon
le laisseront pas inachevé
qu’ils soient menés par un gars
de quarante ans
nourri de pain rompu en quatre ou huit
coeur à l’ouvrage
et trace un sillon droit
qui soit pas toujours à chercher avec qui jouer
garçon plus jeune pour jeter la semence
et en foutre partout
un homme trop jeune est sans cesse à penser
le vent d’hiver
quand souffle le vent du nord
il fait hurler la forêt
le chêne haut feuillu
dans les plis de la montagne
le sapin robuste
sur la terre bonne nourrice
il s’abat
et la forêt jette alors un cri entier
.
les animaux sauvages tremblent
ils mettent leur queue sous leurs couilles
même ceux dont la fourrure abrite la peau
même ceux-là ils ont du poil sur le poitrail
mais rien n’arrête le froid qui traverse la peau des vaches
il passe à travers le poil épais de la chèvre
seuls les moutons qui ont la laine
ne sont pas meurtris
par le vent froid
.
ces jours-là
habille-toi bien c’est mon conseil
mets à tes pieds les bonnes chausses que tu as cousues avec la peau
du boeuf tué
laisse les poils à l’intérieur
mets un manteau bien doux et une tunique bien longue
beaucoup de fils de trame et peu de fils de chaîne
serre toi enveloppé
pour pas que tes poils tremblent
et se dressent sur ta peau
.
quand vient le froid de l’hiver bien vrai
tu peux coudre avec du boyau la peau du chevreau né
de la première portée
c’est pour protéger ta tête tu mets ce bonnet
tu gardes tes oreilles au sec
.
les bêtes des bois
celles qui ont des cornes
et celles qui n’en ont pas
elles grincent des dents
affreusement et dans les broussailles
elles se cachent
et dans les creux elles n’ont que l’idée
de trouver une cache
un trou dans le rocher
.
elles sont
comme l’homme à trois pieds
qui a le dos brisé
qui penche la tête vers la nuit
elles errent comme lui
pour échapper à la nuit blanche
comme la neige
.
mais la fille à peau douce
elle est épargnée
c’est qu’elle reste à la maison
près du feu de l’âtre
et de sa mère qui l’aime
elle lave soigneusement sa peau tendre
avec de l’huile elle la frotte
elle reste au dedans du fond de la maison
elle songe elle a peur
si le soleil n’était plus
est-il mort ma mère
ou par dessus
la tribu des hommes sombres
il est vivant mon enfant il prend son temps
il reviendra chauffer les jours
les bêtes les gens
les saisons
prends garde quand tu entends
la voix de la grue
qui appelle chaque année
du haut des nuages elle indique l’hiver des pluies
c’est dur
pour l’homme sans boeufs
prête moi deux boeufs et un chariot
c’est facile à dire
mes boeufs ont mieux à faire
c’est facile à répondre
quand vient l'hiver du froid
c’est dur
pour l’homme sans bien
.
heureux celui qui habite
les bocages les coteaux
il a sa maison au vallon
loin des vagues et des typhons
heureux celui
qui laboure la terre grasse
avec ses boeufs lourds
et misère à l’homme qui est nu
sous la menace
nu au semis
nu au labour
homme sans boeufs
ni provision
cache-toi au creux du bois
ce froid est dur même aux moutons
.
les feuilles tombent
l’arbre n’y croit plus
.
les vers alors attaquent
avec vigueur le bois de la hache
souviens toi alors le bois de la hache
coupe les doigts à la tache
.
donne aux boeufs la moitié d'une ration
mais pour l’homme tu donnes mieux
les nuits sont longues
elles font du bien
mais enfin les jours sont aussi longs
que les nuits en sommeil la terre
la mère de toutes les bêtes
elle porte cette sorte de fruits
que sont les êtres
les jours et les nuits
.
quand le coucou chante cou cou
sous les feuilles du chêne
la première fois ça fait plaisir
aux hommes sur terre elle est heureuse
et si papa tonnerre
pleut au troisième jour
l’eau monte jusqu'au sabot des boeufs
.
c’est le printemps qui arrive
ne l’attends pas pour tailler les vignes c’est mieux
aiguise les faucilles
réveille les gens
plus de repos à l’ombre au lit à l’aube
voici venu le temps de la moisson
et le soleil brûle la peau
.
tous à l’ouvrage
domestiques et tous les gens
labourez la terre
sèche ou mouillée
au petit matin que les champs soient pleins
.
laboure au printemps
mais la jachère en été c’est bon
sème quand la terre est encore légère
la jachère éloigne le mal
et plaît aux enfants
.
alors qui sème trop tard
égale qui sème trop tôt
c’est le bon moment
sans retard tout pousse à temps
.
soleil le plus brulant
fureur ça va maintenant
les gens suent eau et sang
fracas tonnerre
envoie tes pluies d’été
sur les corps légers
maintenant plus frais
maintenant corps légers
.
munis-toi de fourrage et de litière
comme il faut pour les boeufs et les mules
puis que les gens
reposent leurs genoux
et que les boeufs soient dételés
pour reposer
.
et quand tu auras rangé dans ta maison
comme il faut pour bien vivre
trouve un valet sans famille
une esclave sans enfant
salarie un chien aux crocs durs
ne lésine pas sur la pâtée
.
quand fleurit le chardon et la cigale sonore
dans un arbre sans repos
chante la chanson épuisée
dans la saison d’été
c’est le moment où les chèvres
sont plus grasses que jamais
le vin meilleur les femmes plus chaudes
et les hommes moins vigoureux
.
puise à une source bien coulante
constante pas souillée
verse trois fois l’eau
à la quatrième fois du vin
.
c’est alors qu’il faut boire
à l’ombre d’un rocher
vin des monts
lait de chèvres gateau de lait
manger la viande
d’une vache nourrie au pré
et qui n’a pas vêlé
puis boire du vin noir
assis à l’ombre
le ventre lourd
et le coeur léger
les jours
quand les hommes voient bien
où est le vrai
ils voient les jours décidés par les cieux
pour bien observer les jours
dans l’ordre voulu des cieux
il faut dire aux gens
que le trente du mois est mieux
pour voir le passé
.
D’abord le un
le quatre et le sept sont des jours sacrés
le huit et le neuf sont sacrés aussi
et ces deux jours
dans le mois croissant sont excellents
pour les travaux des gens
.
le onze et le douze
vont bien
pour raser les moutons et pour cueillir les fruits
.
allez le douze va mieux que le onze
quand le mois est croissant
méfie-toi du treize
ne sème pas celui-là
mais pour planter c’est bon
.
le six du début est
mauvais pour les filles
mauvais pour naître et contre le mariage
le sixième du milieu faut pas planter
mais le jour est bon
pour enfanter
va pour la naissance
d’une fille va pour châtrer les béliers
et pour sortir le troupeau
c’est le bon jour
.
le huit du mois
écouille le cochon
et le bouvillon qui gueule
pour les mulets increvables
mieux le douze
excellent aussi pour la naissance d’un fils
il sera un gai luron
.
c’est le grand vingt en plein jour
naissance d’un homme
savant doué d’un esprit profond
le dix est un jour
pour la naissance d’un idiot de ferme
.
pour une fille
le quatre moyen
ce jour-là apprivoise les moutons
les boeufs cornus aux pieds tordus
le chien aux crocs méchants
les mulets increvables et pose la main sur eux
.
prends soin
d’éviter le quatre du début
et le quatre à la fin ou bien
les soucis te mangeront le coeur
.
c’est un jour de grande perfection
le quatre du mois est bon
pour amener chez toi l’épouse
mate les oiseaux
ils sont bons pour ça
.
méfies-toi de tout ce qui est cinq
jours affreux et durs
les Erinyes se déchainent le cinq
à la naissance des enfants de parjure
.
au sept du mois médian
le grain sacré de maman
prends bien soin de le jeter à plat
.
le neuf du début pour les hommes
est inoffensif
mais le neuf du mois médian est meilleur en soirée
c’est un bon jour pour concevoir
et pareil pour enfanter
un fils
aussi bien une fille
c’est pas tout à fait mauvais
.
peu de gens savent que le neuf
du mois finissant est excellent
pour mettre le joug au cou des boeufs
et la bride aux galopants
.
peu de gens savent bien nommer les choses
.
le quatre le jour du mitan sacré
ils sont peu à savoir
que c’est le meilleur après le vingt
surtout à l’aurore
sur le soir il est moins bon
.
il y a des journées marâtres
et d’autres bonnes mères
.
voilà tous les jours qui sont bons
pour ceux qui vivent sur terre
les autres sont décevants
.
on écoute l’un
on se fie à l’autre
personne ne sait rien
heureux et bien payé
celui qui sait
le savoir travaille sans offenser
Il comprend les signes des oiseaux
tout est là
.