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les yeux blancs

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2016

On savait qu'avec la crue la mer serait noyée mais jamais

on ne saurait pourquoi, et par quelle foi

dans l'eau ils flottaient sans nager.

 

Ni pourquoi ils riaient si ouvertement, silencieusement,

et leurs yeux étaient blancs comme ceux des poissons bouillis.

 

Mais ils ne riaient pas,

ils ouvraient grand leurs bouches et leurs yeux sont blancs.



 


Ils ouvraient leurs bouches et ils montrent les dents.

Leurs yeux blancs disaient venez mais sans voir

qu’aujourd’hui encore, on les voit coulant

dans une eau plus épaisse que la mer, d’un bleu plus noir.





Tout vêtus d’anoraks, on flottait sans se débattre.

 

Les remous nous berçant mais c'est violent.

 

Frôlés par des anoraks comme les nôtres on touchait parfois

les corps prenant appui

sur des baigneurs indifférents.





Les baigneurs coulant,

les passeurs paressent

et nous flottons.

 

Têtes renversées, bouches ouvertes

dans un rire muet les parents

disparaissant,

les enfants de face.

 

Ceux qui vivent encore font un geste

de natation ou de la main

un signe réflexe.

Ils sombrent et nous flottons

parmi eux qui périssent

un à un

pour qu’on ne coule pas avec

l’eau du bain.





 


 

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